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« Demain, je pourrai choisir d’habiter avec vous ! »

Le rapport attendu par le gouvernement pour préparer le « déploiement à grande échelle de l’habitat inclusif » a été rendu public fin juin. Les auteurs formulent une douzaine de propositions d’actions pour développer l’habitat « Accompagné, Partagé et Inséré dans la vie locale », et répondre ainsi aux besoins et aspirations des personnes âgées et celles en situation de handicap.

Publié le
, mis à jour le
16 mai 2024
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La résidence « Le jardin d’Hunfelden », située au Thillay (95) - Architecte : MDNH architectes.
(© Crédit photo : F.Delangle / source : archicontemporaine.org)

Le 26 juin 2020, M.Denis Piveteau (Conseiller d’état et président de l’association Simon de Cyrène)  et M. Jacques Wolfrom (Directeur général du groupe ARCADE) ont remis au gouvernement leur rapport sur l’habitat inclusif, lequel a pour objectif de préparer « le lancement d’une stratégie nationale de déploiement de l’habitat inclusif, dans un calendrier compatible avec celui de la réforme prévue du grand âge et de l’autonomie ».  

Vers un habitat Accompagné, Partagé et Inséré dans la vie locale

Dans leur rapport intitulé « Demain, je pourrai choisir d’habiter avec vous », les auteurs encouragent et valorisent les initiatives d’habitat inclusif en faveur des personnes en situation de handicap et les personnes âgées ayant besoin d’être soutenues dans leur projet d’autonomie.

Ce rapport repose sur trois constats rappelés en introduction :

  1. « La reconnaissance croissante de ce qu’il faut permettre à chacun d’être le plus pleinement capable, malgré l’âge ou le handicap » ;
  2. « Le désir du « droit commun » pour tous » et « la réticence croissante à l’idée d’aller demeurer dans des habitats réservés, à l’écart » ;
  3. « La montée massive des situations d’isolement et leur cortège de conséquences psychologiques, sociales et de santé ».

C’est au regard de ces trois mouvements de fond que les auteurs proposent un « habitat accompagné, partagé et inséré dans la vie locale » (habitat API), dont l’objectif principal est de permettre aux personnes vulnérables, âgées en perte d’autonomie et celles qui vivent avec un handicap, d’avoir le choix de leur habitat et de leur mode de vie. L’habitat « API » devrait permettre ainsi à chacun, s’il le souhaite, de « vivre chez soi sans être seul », et ainsi « d’avoir le choix de vivre, seul ou en famille, dans son logement au lieu d’opter pour le mode collectif que propose un établissement (type foyer ou EHPAD) ». 

« Se loger, partager certains temps de vie et être, seul ou à plusieurs, soutenu et stimulé dans l’autonomie au quotidien »

Pour écarter notamment le risque d’isolement, les auteurs préconisent tout d’abord la création de lieux de vie, logements et résidences, permettant de partager certains moments de vie quotidienne avec d’autres, « en organisant des logements ordinaires aménagés à cette fin, regroupés en unité de petite taille, une solidarité de type familial, sécurisées en services et ouvertes sur l’extérieur ».

D’autre part, ces formes d’habitat doivent conserver une « dimension d’intimité privative » mais aussi toutes les caractéristiques « en termes de liberté d’aller et de venir, de centralité, d’accès aux services, aux commerces, aux transports, etc. ». Les résidents, personnes vulnérables ou non, seront en capacité ainsi de « participer naturellement à la vie sociale », et « réellement présentes dans la vie collective ».

Enfin, cet habitat doit être organisé de « tous les éléments d’accompagnement nécessaires » pour que les capacités d’autonomie des personnes vulnérables puissent s’exprimer.  

Les 12 propositions pour « vivre chez soi sans être seul »

Après avoir identifié les douze principaux freins au développement de l’habitat inclusif, les auteurs déclinent pour chacun une série de propositions concrètes qui devraient permettre un « changement de paradigme ». Celles-ci portent sur l’évolution ou l’assouplissement des cadres techniques et juridiques en place, la solvabilisation financière des personnes et des projets, ainsi que la mobilisation des communautés d’acteurs locaux.

Les auteurs précisent dans un premier temps la « logique d’ensemble » de leur rapport, soient les quatre fils conducteurs conduisant à bâtir leurs propositions :

  1. Chercher des réponses à partir des personnes : « penser, chaque fois que possible, les interventions publiques sous forme d’aide à la personne » ;
  2. Exprimer le droit commun du logement en pensant à partir du logement, plutôt que du handicap ou du grand âge : « l’habitat API est un habitat pour tous mêlé à d’autres habitats pour tous, qui vient rencontrer très particulièrement les situations de perte d’autonomie » ;
  3. Transformer et non concurrencer l’offre sociale ou médico-sociale : « il y a des formes d’habitat, même qualifiées de médico-sociales, qui côtoient le champ de l’habitat API » ;
  4. Penser le déploiement de l’habitat API de manière pérenne en intégrant une démarche d’évaluation et d’amélioration permanente : s’engager dans une « phase pilote, d’une durée de quatre ans, pendant laquelle pourront se mettre en place , sous des régimes le cas échéant provisoires ou transitoires, les premiers éléments juridiques et financiers du plan national ».

Les auteurs présentent ensuite, sous forme de « fiches » séparées, leurs recommandations pour lever les obstacles au déploiement de l’habitat API. Le tableau ci-dessous reprend notamment pour chacun des douze freins identifiés des « idées pour l’action », lesquelles sont également déclinées en propositions concrètes dans le rapport.

Tableau récapitulatif des « douze idées pour l’action » pour lever les obstacles au déploiement de l’habitat API (extrait du rapport, p.25)

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Focus sur la proposition 6 :  la transformation des logements en habitat API, un défi à relever pour les architectes

Le sixième frein identifié au déploiement de l’habitat inclusif est la difficulté de mobiliser des fonciers et surfaces en zone tendue, renforcée par la nécessité de réserver une surface importante à des espaces communs dédiés à la vie partagée.

Les auteurs proposent « d’engager des opérations d’optimisation d’occupation du logement social », particulièrement en zone tendue, « en s’appuyant sur des transformations en logements API ». Ils préconisent en effet de conduire des opérations de restructuration dans le parc existant, en favorisant notamment la transformation des grands logements, qu’ils soient occupés par des personnes âgées isolées ou vacants en zone tendue, pour les adapter à un mode de vie en habitat API.

Les architectes ont un rôle à jouer dans cette démarche de réhabilitation du bâti existant, et dans la création de logements de plus petite taille et d’espaces partagés adaptés, avec une attention particulière portée sur la qualité environnementale, l’accessibilité et un niveau d’équipement technologique facilitant l’aide à la vie quotidienne.

Un défi à relever pour concevoir un logement plus adapté en faveur des personnes en perte d’autonomie, et garantir ainsi les bonnes conditions d’habitation à tous.

Pour aller plus loin :

 

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