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Consommation de matériaux : les scénarios 2035-2050 de l'Ademe

A travers deux études prospectives publiées en décembre 2019, l’Ademe a estimé les besoins en matériaux pour la construction neuve et la rénovation d’ici à 2050. Selon l'agence, la construction de bâtiments neufs serait "17 fois plus" consommatrice de ressources que leur rénovation.

Mis à jour le
16 mai 2024
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A travers deux études prospectives publiées en décembre 2019, l’Ademe a comparé les quantités de matériaux nécessaires pour la construction de bâtiments neufs et la rénovation de l’ensemble du parc résidentiel d’ici à 2050.  Selon l’agence, la construction neuve serait « 17 fois plus » consommatrice de ressources que leur rénovation au niveau BBC (Bâtiments Basse Consommation)

Face à la raréfaction des ressources et aux contraintes croissantes sur leur exploitation, l’Ademe a souhaité estimer les quantités de matières consommées par la construction neuve et la rénovation du parc résidentiel aux horizons 2035 et 2050. Les études « Prospectives 2035 et 2050 de consommation de matériaux pour la construction neuve et la rénovation BBC » réalisées en partenariat avec le CSTB ont permis d’identifier les consommations de matières premières associées à plusieurs scénarios d’évolution du parc de logements en France.

Cet exercice de prospective à long terme pourrait permettre d’anticiper et de s’adapter aux éventuelles pénuries de ressources mais aussi de mieux identifier les gisements de déchets, et leur potentiel de valorisation. 
 

Etude 1 – Prospective de la consommation de matériaux pour la construction neuve d’ici à 2050

La première étude concerne le secteur du bâtiment neuf, et apporte des éléments de prospective sur les quantités de matière consommées par la production de bâtiments neufs à l’horizon 2050 : le périmètre considéré couvre les bâtiments résidentiels (logements individuels isolés et groupés, logements collectifs et EHPAD) et certains types de bâtiments tertiaires (commerces de grande distribution, hôtels, enseignement, bureaux).

L'utilisation d'une vingtaine de matériaux couramment utilisés dans la construction en France métropolitaine (Granulats, Sable, Ciment, Terre cuite, Bois, Acier, etc.) a été modélisée pour estimer les consommations de matière.

L’approche prospective se base sur des évolutions du volume de logements et de surfaces annuellement construites issues du scénario de réduction des émissions de gaz à effet de serre de la Stratégie Nationale Bas Carbonne (SNBC), et sur une évolution de la représentativité des différentes typologies de bâtiment.

En matière de volume de construction, le scénario de la SNBC correspond à deux tendances :

  1. Une baisse de la construction pour le secteur résidentiel (-7% en 2035 et -38% en 2050), à l’exception des EHPAD qui présentent une dynamique croissante (+22% en 2035 et + 43% en 2050) : le volume de logements baisserait de 117 000 à 71 000 pour les maisons individuelles diffuses, de 41 000 à 25 000  pour les maisons individuelles groupées, et de 176 000 à 107 500 pour les logements collectifs alors que 2000 EHPAD supplémentaires devraient être construits entre 2015 et 2050.
  2. Une baisse des surfaces construites dans le secteur tertiaire d’ici à 2035 puis leur augmentation entre 2035 et 2050, à des rythmes différents selon l’usage du bâtiment:  baisse de 50% de la surface construite en 2035 pour les Bureaux et administration puis hausse de 7% en 2050, et baisse respectivement de 26%, 10% et 20% des nouvelles surfaces destinées à l’enseignement, à la grande distribution et aux hôtels en 2035 puis hausse de 5% environ entre 2035 et 2050.

En matière d’évolution des marchés des produits de construction et des modes constructifs, deux scénarios techniques ont été retenus :

  1. Scénario « Business as usual » : stabilité des parts de marché des produits de construction et des solutions techniques pour le secteur résidentiel, et stabilité des surfaces construites par modes constructifs pour le secteur tertiaire  
  2. Scénario « Bois et Biosourcés » : augmentation des parts de marché du bois et des matériaux biosourcés, et développement des modes constructifs bois ou mixte bois/béton avec des taux d’utilisation des matériaux biosourcés représentant a minima 20% et allant jusqu’à 35% en 2050 (contre généralement moins de 10% en 2015) 

Chiffres-clés 

Consommation de matériaux de la construction neuve aujourd'hui

  • 51 millions de tonnes de matériaux ont été consommées en 2015 pour la construction neuve, dont environ 35% pour les fondations et infrastructures
  • Plus de 80% de la consommation concerne le secteur résidentiel, majoritairement représenté par les constructions de Maisons Individuelles
  • 95% de la consommation est constituée de matériaux minéraux, où les granulats et le sable représentent respectivement plus de 40% et plus de 30%

Consommation de matériaux de la construction neuve d’ici à 2050

  • La consommation annuelle de matière première devrait baisser de près de 40% par rapport à 2015 du fait de la réduction anticipée des surfaces construites (-37%)
  • Dans le scénario « Business as usual » - stabilité des tendances de consommations entre 2015 et 2050 – la consommation de matériaux jusqu’en 2050 s’établirait à 1,5 milliards de tonnes, dont 85% pour le secteur résidentiel. Les matériaux pondéreux (ciment, sable et granulats) représenteraient 85% de la matière totale consommée. 
  • Dans le scénario « Bois et biosourcés », une légère baisse des consommations de matériaux entre 2015 et 2050 est prédite du fait de la substitution de matériaux pondéreux par des matériaux bois et biosourcés par rapport à la consommation attendue dans le premier scénario (-2% d’ici à 2035 et -6% de 2035 à 2050). La consommation de bois serait 13% supérieure à celle annoncée dans le premier scénario, et la consommation d’isolants bois et biosourcés près de 2,3 fois plus importante.
     

Etude 2 – Prospective de la consommation de matériaux pour la rénovation énergétique BBC des bâtiments résidentiels aux horizons 2035 et 2050

La seconde étude concerne le secteur de la rénovation, et fournit une estimation des quantités de matière nécessaires pour la rénovation du parc résidentiel Français à l’horizon 2050 : le périmètre couvre l’ensemble du secteur résidentiel (maisons individuelles et logements collectifs), en ne considérant que les rénovations énergétiques au niveau BBC.

En matière de scénarios de rénovation,  deux scénarios d’évolution des solutions techniques ont été élaborés :

  1. Un scénario technique « tendanciel » : stabilité des tendances actuelles dans les solutions techniques et les matériaux utilisés (utilisation des solutions existantes, augmentation progressive de la part d’isolation par l’extérieur, utilisation des isolations traditionnels dans leur variante la plus performante et augmentation de l’utilisation de matériaux biosourcés, en particulier le bois)
  2. Un scénario technique « innovant » : visant à atteindre plus facilement les objectifs de volume de rénovation et de gains environnementaux, combinant aux solutions techniques existantes des solutions plus innovantes (utilisation de Panneaux isolant sous Vide, utilisation d’aérogels, …) et une utilisation plus importante des matériaux biosourcés

En matière de volume de rénovation,  trois scénarios distinguant les rythmes de travaux sur les logements ont également été étudiés, y compris celui pour lequel le niveau BBC serait quasi atteint en 2050 (pour l’ensemble du parc de logements antérieur à 1975 et 80% du parc de logements construits entre 1975 et 2012).

En complément de l’évaluation des besoins en matériaux, l’Ademe a cherché à quantifier le volume de déchets générés par la rénovation BBC du parc résidentiel.

Chiffres-clés

Consommation de matériaux pour la rénovation des logements avec l’objectif 100% BBC d’ici à 2050

  • Environ 74 millions de tonnes de matériaux (dont 17 millions de tonnes d’isolants) seraient consommées jusqu’en 2050 pour la rénovation BBC de l’ensemble des logements, dont plus de 80% pour les maisons individuelles.
  • Les quantités d’isolants nécessaires seraient 7 fois plus importantes pour les maisons individuelles que pour les logements collectifs
  • La consommation de laine de verre liée à la rénovation s’élèverait à 150 millions de m3, et celle des isolants biosourcés à près de 140 millions de m3

Production de déchets générés par les travaux de rénovation avec l’objectif de 100% des logements BBC d’ici à 2050

  • Pour les isolants, les déchets de laine de verre seraient les plus importants en représentant 202 000 à 478 000 tonnes à l’horizon 2050, avant les déchets de polystyrène et de ouate de cellulose (inférieurs à 145 000 tonnes)
  • Pour les menuiseries, les fenêtres représenteraient les principaux déchets(189 millions de fenêtres remplacées, dont 75% pour les maisons individuelles) suivies des volets et portes en bois (près de 60 millions de volets battants en bois et 15 millions de portes en bois seraient remplacés, soit près de 80% pour les maisons individuelles)
  • Le scénario visant l’objectif de 100% des logements rénovés au niveau BBC d’ici à 2050 induirait une production de déchets 2,5 fois supérieure par rapport à un scénario de continuité du taux de rénovation des logements (45% des logements construits avant 1975 et 38% de ceux construits avant 2012), dont la majorité proviendrait de la rénovation des maisons individuelles


Ratios-clés de consommation de ressources

La construction neuve de logements plus consommatrice que leur rénovation, même avec un ralentissement de 40% de la construction neuve d’ici à 2050

  • La construction neuve serait « 17 fois plus » consommatrice de ressources que la rénovation sur la période 2015 – 2050.
  • La construction d’une maison individuelle consommerait en moyenne 40 fois plus de matériaux que la rénovation, et celle d’un EHPAD ou d’un immeuble de logements collectifs environ 80 fois plus.

Pour conclure, l’Ademe annonce « que les quantités de ressources à mobiliser pour construire un logement sont plusieurs dizaines de fois supérieures aux quantités nécessaires pour rénover un logement ». Au regard des questions de pression sur les ressources et d’empreinte carbone, l’Ademe en publiant ces deux études prospectives plaide « en faveur de la rénovation, et pour limiter autant que possible la construction neuve au strict nécessaire »

Le secteur du bâtiment serait quasi-complètement décarboné en 2050 avec une réduction des émissions de -89% selon le scénario tendanciel « avec mesures existantes » (AME).
Source : Projet de Stratégie Nationale Bas-Carbone - Version projet Décembre 2018


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