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Le mal-logement à l’heure des crises

Dans son 28ème rapport sur l'état du mal-logement en France, la Fondation Abbé Pierre dresse le portrait d’une situation tendue suite aux crises de la pandémie et de l’inflation. Le mal-logement est aussi une question de genre, avec une surreprésentation des mères célibataires.
Publié le
, mis à jour le
1 mai 2024
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28e rapport sur l'état du mal-logement en France
(Fondation Abbé Pierre)

Selon le 28ème rapport de la Fondation Abbé Pierre, la France compte 4,1 millions de personnes mal-logées, dont 330 000 sans-abris, 2 819 000 personnes vivant dans des conditions de logement très difficiles du point de vue du confort et 934 000 personnes en surpeuplement dit "accentué". 12,1 millions de personnes fragilisées par rapport au Logement. Au total, près de 15 millions de personnes sont toujours touchées par la crise du logement.

"D’une crise à l’autre" : dans le 1er "cahier" de son rapport, la Fondation fait l’analyse économique du mal-logement dans un contexte de crise post-pandémique et d’inflation.

Elle signale que la hausse des prix de l’immobilier tend à se répandre dans la plupart des régions, et dans nombre de villes moyennes, à l’heure de la baisse du pouvoir d’achat liée à l’inflation.

La Fondation souligne que la facture du logement, liée à trois décennies de hausse des prix à l’achat et à la location, est encore alourdie par des dépenses énergétiques devenues insoutenables pour de nombreux ménages modestes.

Elle regrette que "la puissance publique et le gouvernement ne semblent pas avoir pris toute la mesure de l’enjeu." Et elle pointe notamment une chute de l’effort public pour le logement, via notamment une baisse des aides à la pierre.

Seulement 95 000 logements sociaux ont été financés par l’Etat en 2021 : ces chiffres très en-deçà des objectifs gouvernementaux s’expliquent surtout, selon la Fondation, par la réduction des capacités financières des organismes HLM.

Pour la FAP, "la dynamique de la philosophie du Logement d’abord promue depuis 2017, avec un changement d’approche et des réalisations intéressantes, a été fortement freinée par l’austérité budgétaire imposée au secteur du logement". La FAP demande donc de relancer la politique du "Logement d’abord" et de cesser les coupes budgétaires sur les allocataires des APL et sur le monde HLM.

Dans le 2ème "cahier" de son rapport, la Fondation s’intéresse au "genre du mal-logement" avec une étude très détaillée des difficultés rencontrées par les femmes ainsi que par les minorités sexuelles.

"Face au logement, être un homme ou une femme, ou appartenir à une minorité sexuelle, affecte considérablement les risques de subir diverses dimensions du mal-logement"

En effet, le Mal-logement frappe deux à trois fois plus les femmes célibataires avec enfants que la moyenne des ménages. Les familles monoparentales, constituées à 83 % de femmes seules avec enfants, sont surreprésentées parmi les familles en difficulté. Les femmes sont moins souvent propriétaires et plus souvent en situation de précarité que les hommes. Les personnes LGBTQ+ sont aussi, en raison de leur "invisibilisation" et des discriminations qu’elles subissent, plus susceptibles de se retrouver en situation de mal-logement.


2022, une année perdue ?

"Entre la campagne présidentielle, écrit la Fondation, l’absence de ministre du Logement pendant des mois et la faiblesse du programme présidentiel sur le logement, l’année 2022 a été une année blanche ou presque dans la lutte contre le mal-logement".

La FAP regrette notamment la non mise en œuvre de la promesse d’étendre la garantie locative VISALE à tous les locataires, les limites de l’encadrement des loyers, la fiscalité avantageuse dont profitent les plateformes de location saisonnière et encore une fois les ponctions financières sur le logement social. Elle redoute également la mise en œuvre de la proposition de loi anti-squat adoptée en décembre 2022 à l’Assemblée nationale.

La FAP note cependant quelques avancées : la fin des coupures d’électricité par EDF suite à des impayés, ou la modération des loyers des passoires thermiques et l’interdiction de location des pires d’entre elles depuis le 1er janvier 2023.

Quant à MaPrimeRenov’, le dispositif, qui favorise les mono-gestes de rénovation, peut mieux faire, car "les rénovations énergétiques sont nombreuses mais insuffisamment performantes".

En revanche, la Fondation pointe que "l’aide la plus vertueuse de l’Anah, Habiter Mieux sérénité (rebaptisée MaPrimeRénov’ Sérénité) réservée aux ménages modestes pour des bouquets de travaux permettant un gain de performance énergétique d’au moins 35 %, avec un accompagnement systématique, continue de stagner autour de 45 000 logements par an".

Afin d’augmenter le nombre de ces rénovation la Fondation appelle à diminuer le reste à charge des foyers les plus modestes, notamment dans le cadre des copropriétés.

Elle rappelle enfin que seuls 15 000 logements indignes ont été rénovés en 2021, alors qu’on en dénombre 600 000.
 

>> Télécharger le 28ème rapport sur l'état du mal-logement en France 2023

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