
Plan national d’adaptation au changement climatique - campagne audomaroise
Le gouvernement a présenté lundi 10 mars le troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3).
Ces 52 mesures doivent adapter la France aux évolutions du climat des prochaines années et décennies, dont un réchauffement attendu de +4°C en 2100.
Plan national d’adaptation au changement climatique - campagne audomaroise
Les changements climatiques impactent déjà la France. Ce n’est pas qu’un enjeu du futur, il concerne aussi notre présent et notre passé. 9 des 10 dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées, 313 communes ont été déclarées en état de catastrophe naturelle lors des inondations dans les Hauts-de-France l’an dernier, Mayotte vient de subir un cyclone dévastateur dont les conséquences se feront sentir pendant des années, etc. Certaines des options politiques qui étaient à notre disposition ne le sont plus, faute d’avoir agi à temps.
Et ce n’est que le début. Le climat dans l’hexagone sur la dernière décennie était 1,7°C plus chaud qu’il y a 100 ans, et il va continuer de se réchauffer. En 2023, le gouvernement a retenu une « trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique » (TRACC). C’est un scénario de réchauffement fondé sur le consensus scientifique. Il pose des étapes de réchauffement à +2°C en 2030, +2,7°C en 2050 et +4°C en 2100 dans l’hexagone (l’an dernier, le Secrétariat général à la planification écologique estimait les coûts directs en 2100 d’un tel réchauffement à 10% du PIB, si nous ne mettions pas en place des mesures de prévention).
Le Conseil national de l’Ordre des architectes se veut moteur sur ce sujet, notamment depuis la publication du plaidoyer « Habitats, Villes, Territoires, l’architecture comme solution » en 2022, et a fortiori depuis le vote d’une stratégie d’adaptation en décembre dernier, déjà expérimentée à Mayotte après le cyclone Chido, et qui va se poursuivre sur les prochains mois puis années.
Le PNACC-3 qui vient d’être publié par le Gouvernement vise l’adaptation de tous les domaines sociaux et économiques, de toutes les politiques publiques, aux répercussions qu’auront ces évolutions probables du climat.
Il propose 52 mesures, déclinées en 200 actions, concernant différentes échéances en 2030, 2050 et 2100. Elles concernent tous les domaines et répondent à plusieurs risques comme :
Pour le secteur du bâtiment, les risques principaux sont :
Le PNACC-3 prévoit des mesures d’adaptation déclinées dans tous les territoires : les effets des changements seront très disparates d’un endroit à l’autre. Cela passera par exemple par les conférences climat régionales, des « référents adaptation » dans chaque préfecture ou encore 100 intercommunalités pilotes sur l’adaptation. Il invite aussi à un développement de la culture du risque.
Par ailleurs, une des mesures prévoit que chaque collectivité territoriale intègre progressivement la trajectoire de réchauffement de référence et prévoit des mesures d’adaptation dans ses documents de planification. Planifier sans prendre en compte l’évolution du climat ne doit plus être possible. L’architecture répond parfaitement à cette mesure, en apportant des solutions aux élus pour définir des projets urbains soutenables, réencastrés dans leurs contextes climatiques, territoriaux, économiques, culturels et patrimoniaux. À ce titre, le « PLUi pour tous » de Billom Communauté, dans le Puy-de-Dôme — auquel l’atelier de Montrottier, Loïc Parmentier & Associés a contribué — est une source d’inspiration.
Les architectes ont des compétences essentielles à la réussite de l’adaptation de notre cadre de vie. Le Conseil national de l’Ordre des architectes a pu partager sa vision lors de la concertation organisée par le Gouvernement sur le PNACC-3 l’automne dernier, et défendre le rôle de premier plan que doivent avoir les architectes. Des propositions au service de l’architecture plus largement ont aussi été retenues, comme sur le confort d’été ou les solutions low tech.
Le Gouvernement a reconnu la place particulière des architectes sur plusieurs points. Pour la gestion du risque incendie, il compte publier des fiches techniques « Dispositions constructives », dont le but sera de faciliter le travail des architectes par des solutions techniques de prévention.
Sur la réhabilitation énergétique du patrimoine et du bâti ancien, le Gouvernement s’adresse aux Architectes des bâtiments de France. Il compte faire évoluer les documents de gestion des sites patrimoniaux remarquables pour mieux intégrer les systèmes de protection solaire, et publier des recommandations permettant de concilier protection solaire et qualité architecturale et patrimoniale.
Enfin sur les sujets de la végétalisation, du génie écologique et des solutions d’adaptation fondées sur la nature, le PNACC-3 propose une concertation avec les filières professionnelles (dont les architectes) dans le cadre du Plan Nature en ville, pour renforcer la formation et faciliter la montée en compétences. Les architectes doivent contribuer à « la fabrique d’espaces de nature qui adaptent la ville au changement climatique et qui y soient adaptés ». C’est un point que l’Ordre défend depuis plusieurs années, notamment par son implication dans le Plan nature en ville (ce qui a donné lieu à la publication du guide Rénovation du bâti et biodiversité).
Plus largement, même lorsqu’ils ne sont pas mentionnés explicitement, le PNACC-3 représente déjà de nombreux projets d’adaptation auxquels les architectes peuvent contribuer. La première mesure du Plan est l’augmentation de 30% du Fonds Barnier, financeur des projets de prévention des risques naturels majeurs, pour le passer à 300 millions d’euros par an.
Pour des territoires exposés au recul du trait de côte, cela représente le financement de politiques de recomposition de la bande côtière, avec des contrats pour l’adaptation des bâtiments les plus exposés, mais aussi pour l’aménagement de nouvelles infrastructures dans l’arrière-pays. Un exemple concret serait le déménagement du village de Miquelon, vulnérable au risque de submersion marine, qui doit être accompagné financièrement par le Fonds Barnier.
Les politiques d’adaptation au risque d’inondation vont également avoir le vent en poupe. Mais il ne s’agit pas de définir des plans autonomes dédiés uniquement aux inondations, il s’agit plutôt de recomposer un territoire dans son ensemble pour qu’il puisse devenir d’un seul geste résilient face aux risques (multiples) ainsi que plus cohérent et agréable. De tels projets vont avoir vocation à se multiplier et à faire appel aux architectes.
Sur tout le territoire, l’enjeu numéro un sera sans doute l’adaptation à la chaleur et la préservation du confort d’été. Architecture bioclimatique, low tech, écomatériaux et végétalisation sont autant de solutions que les architectes vont pouvoir massifier par leur participation au chantier national pour la rénovation des bâtiments. Chaque contexte sera porteur de solutions différentes. C’est ce que l’on constate avec la réhabilitation de la caserne Exelmans à Paris, où brunquell & andré architectes ont misé sur la végétalisation des espaces extérieurs, la création d’appartements traversants et la solidarité — grâce à un programme mixte incluant du logement social, un centre d’hébergement d’urgence, des bureaux, un local associatif. Dans un autre contexte, à Bordeaux pour la rénovation de 530 logements du Grand Parc, l’agence Lacaton & Vassal a misé sur la qualité des enveloppes, l’ajout de jardins d’hiver et de balcons en extension, pour améliorer d’un seul geste confort et performance énergétique.
Et ce ne sont là que quelques exemples. Les architectes mettent déjà en œuvre sur tout le territoire des projets vertueux et exemplaires pour adapter notre cadre de vie aux nouvelles conditions climatiques.
Si le PNACC-3 comporte de nombreuses mesures intéressantes et pertinentes, deux points essentiels font encore défaut. D’une part, il ne s’agit pour l’instant que d’un plan et pas d’un cadre juridique contraignant. Les différentes actions proposées devront être travaillées par leurs responsables désignés ; elles se traduiront — ou non — en actions concrètes au cas par cas.
D’autre part, les financements mobilisés restent bien inférieurs aux besoins. Le fonds Barnier est augmenté de plusieurs dizaines de millions pour atteindre 300 millions d’euros, mais les 260 millions d’euros du fonds vert ne sont que redirigés vers l’adaptation, au détriment d’autres projets. Même chose pour le milliard d’euros du budget des agences de l’eau qui sera fléché vers l’adaptation. Des financements européens pourront aussi être obtenus, mais ce travail reste à faire.
Après avoir contribué à la définition des orientations du PNACC-3, le Conseil national de l’Ordre des architectes s’investira aux côtés de tous les acteurs pertinents sur la mise en œuvre d’actions concrètes. De plus, à l’instar du Plan du gouvernement, la stratégie d’adaptation des architectes doit se décliner dans les territoires. Un travail qui sera mené en concertation avec les Conseils régionaux de l’Ordre des architectes : l’architecture comme solution doit se concrétiser partout.
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